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Colloque international "Chronologie, astronomie, histoire"

Colloque international organisé par Chantal Grell et Edouard Melh sous l'égide du RTP/INSU.

du 20 octobre 2011 au 21 octobre 2011

jeudi 20 et vendredi 21 octobre 2011
Université de Strasbourg - Institut Le Bel
4, rue Blaise Pascal
67070 Strasbourg
Pour étudier et établir les âges du monde dans l’Occident médiéval latin, la « chronologie », disposait essentiellement de la Bible. Aussi pouvait-on la considérer, jusqu’à une époque tardive, comme une science biblique entièrement fondée sur l’analyse de l’Écriture, dans la lignée des travaux initiés par les Pères de l’Église — qui n’étaient précisément pas concordants : une chronologie dite « courte », sur la base de la version massorétique, adoptée par saint Jérôme, envisageait la Création autour de 4000 ans avant l’Incarnation. Une chronologie dite longue, élaborée à partir de la version grecque des LXX, ajoutait quelque douze siècles à l’histoire du monde. L’Église n’avait pas tranché : Eusèbe avait suivi les Septante, et saint Jérôme, interprète d’Eusèbe et des Écritures avait adopté, dans la traduction qui lui est attribuée, dite « Vulgate », une chronologie resserrée.
 
C’est principalement à l’âge de l’Humanisme, au temps de la Réforme et de la révolution astronomique, que se fit la rencontre de la chronologie avec l’astronomie, science dont la finalité n’était donc pas seulement d’expliquer le liber naturae : elle pouvait aussi, par l’étude comparée du temps astronomique et de la chronologie biblique, contribuer à déterminer les âges du monde, son commencement, et sa fin — au point que l’humaniste Melanchthon, par exemple, pouvait faire de la connaissance de l’histoire la finalité principale de l’astronomie, reine des sciences mathématiques. Ses travaux d’historien (la Chronique de Jean Carion) et d’astronome (Initia physicae doctrinae) sont pratiquement indissociables. Même dans le célèbre Avis au Lecteur que le théologien Osiander avait subrepticement ajouté au De Revolutionibus orbium coelestium (1543) copernicien, cette dimension historique de l’astronomie était encore indiquée, puisqu’il appartenait à l’astronome, selon le théologien, d’ « inventer des hypothèses quelconques, par la supposition desquelles on puisse calculer avec exactitude, à partir des principes de la géométrie, ces mouvements tant pour le futur que pour le passé ».

Cette application de l’astronomie au domaine de l’histoire humaine ne se limite pas au seul domaine allemand : d’une part elle est fortement assise sur l’héritage arabo-médiéval et la théorie astronomico-astrologique des grandes conjonctions planétaires (Albumasar) ; d’autre part le lien étroit entre astronomie et histoire se vérifie aussi dans d’autres aires culturelles (cf. l’épistémologie d’un Jean Bodin). Enfin ses objets sont divers : vérification de la chronologie exacte et durée des « générations » bibliques, détermination astronomique rétrospective d’événements (Étoile de Bethléem) d’après des tables astronomiques plus exactes, pronostics astrologiques et calcul de la fin du monde, réforme du calendrier… Le colloque se proposera d’en explorer les diverses facettes, et de comprendre synthétiquement leur articulation, tâche que la diversité des sources et la technicité des arguments déployés peut rendre malaisée.

Cette convergence, idéale pour certains, forcée pour d’autres, des sciences de la nature et des sciences humaines pouvait-elle survivre à l’Humanisme de la Renaissance tardive ? De fait, un tournant s’observe autour des années 1600 dans le rapport de subordination de l’astronomie à la chronologie ; les terrains semblent de plus en plus distincts, et la science astronomique, sécularisée, semble s’affranchir progressivement de cette fonction ancillaire. L’intervention de l’astronomie dans le champ de la chronologie et de l’histoire demeure une réalité (Kepler ou Newton en témoignent) mais c’est un fait que les sciences de la nature et les sciences humaines ont perdu le principe de leur unité qui avait perduré jusqu’à l’époque du Späthumanismus.
Informations complémentaires

Organisation :

Chantal Grell (Laboratoire ESR - UVSQ) et Édouard Melh  (Université de Strasbourg, EA 2326)

Programme et affiche :